Séminaire Sexualités imprimées #4 : Tom of Finland et G.B. Jones
Avec son cycle « Sexualités imprimées », la Bibliothèque Kandinsky entend relire ses collections au prisme de la culture visuelle LGBTQI+, des livres illustrés de Jean Boullet aux queer zines, de la presse érotique des années 1930 aux magazines homosexuels des années 1980. Différents par leur format, les objets discutés le sont également par leur contexte de production et leur mode de diffusion.
G.B. Jones et Bruce LaBruce (ed.), J.D.s, n° 1, 1985/2008, fonds AA Bronson, Bibliothèque Kandinsky, illustration : G.B. Jones
Athletic Model Guild (ed.), Physique Pictorial, vol. XVI, n° 4, février 1968, Bibliothèque Kandinsky, P 241 C, illustration : Tom of Finland
Pour sa quatrième et avant-dernière séance de l'année, le séminaire « Sexualités imprimées » se focalise sur la production de deux illustrateur·ices, Tom of Finland avec Pierre-Alexandre Mateos et Charles Teyssou, et G.B. Jones avec Ana Mendoza Aldana.
Tom of Finland / Pierre-Alexandre Mateos et Charles Teyssou
Tom of Finland (Kaarina, 1920-1991, Helsinki) est un dessinateur d’une abondante œuvre graphique et picturale homosexuelle de genre érotique et pornographique. Il s’agira de retracer l’itinéraire artistique de Tom of Finland et ses influences avant de devenir une célébrité gay mondiale. Nous évoquerons ces interventions artistiques dans le magazine Physique Pictorial (1951-), un beefcake magazine ou magazine de muscle qui, derrière sa couverture sportive, popularisera un ethos érotique gay rustique, leather et working class. S’attachant à décrire une masculinité hyperbolique et décomplexée, son travail est aussi imprégné d’enjeux politiques tels qu’une représentation joyeuse et désinhibée de la sexualité homosexuelle, l’appropriation d’espaces publics et leur sexualisation, la construction d’une performance de genre outrée, les représentions de relations interraciales ou encore la possibilité d’une scène gay comme des lieux de politisation et de structuration. Nous reviendrons enfin sur l’héritage majeur qu’il opéra sur des scènes d’artistes dîtes outsiders, souvent cantonnées à l’erotica, dénomination arbitraire dont il aura été lui-même victime. Enfin, nous aborderons la création après sa mort de la Tom of Finland Foundation à Los Angeles, qui permit d’archiver des milliers d’œuvres vouées à l’oubli après l'hécatombe du sida, et son rôle actuel de résidence pour des artistes LGBTQIA.
Pierre-Alexandre Mateos et Charles Teyssou sont un duo d'écrivains et de commissaires d'exposition basé à Paris. Leurs projets actuels incluent Paris Orbital, un programme public à la Collection Pinault - Bourse de Commerce sur les liens entre les mythologies parisiennes et la culture pulp, et une publication sur la croisière homosexuelle avec HEAD (Genève) et Spector Books (Leipzig). Ils organiseront pour la troisième édition de Paris+ Art Basel le programme Conversations, en octobre 2024. En 2024, ils inaugureront la première session de Stavanger Secession, un programme discursif et visuel à Stavanger (Norvège).
G.B. Jones : désirs queer dans la scène punk / Ana Mendoza Aldana
G.B. Jones (1965-) est artiste, musicienne, réalisatrice et éditrice de fanzines punk, canadienne. Elle est membre du groupe éphémère synth-expérimental Bunny & the Lakers, puis de Fifth Column, groupe punk composé exclusivement de femmes, dont les rumeurs disent qu'elles seraient toutes lesbiennes. Particulièrement active à la fin des années 1980 et les années 1990 à Toronto, elle est notamment connue pour avoir créé avec Bruce LaBruce le fanzine queer et punk J.D.s qui donne naissance au mouvement musical, culturel et social Homocore/Queercore.
Diffusées dans J.D.s, les Tom Girls de G.B. Jones transposent les codes des créations érotiques de Tom of Finland dans un univers intégralement féminin. Ancrée dans la troisième vague féministe et retenant les leçons de l'anarchisme et des situationnistes, l'œuvre de G.B. Jones remet en question les diktats hétéropatriarcaux, l'homonormativé gay et lesbienne, et propose une nouvelle forme de désir queer.
Ana Mendoza Aldana est curatrice et critique d'art. Ses expositions prennent souvent pour point de départ la littérature et accordent une place particulière à la peinture. Elle a travaillé aux galeries Triple V et Air de Paris. Depuis 2020, elle est responsable de la recherche curatoriale, de la communication et des éditions au Centre d'art contemporain d'Ivry — le Crédac. Elle a organisé, entre autres, La Fugitive (2022) au Crédac, El oro de los tigres (2020) à Air de Paris, La réalité viscérale (2018) aux Bains Douches à Alençon, et The Floating Admiral (2013) au Palais de Tokyo.